L’Union : Nous apprenons que la Ceca-Gadis a décidé de fermer plusieurs magasins de proximité. De quoi s’agit-il exactement ?
Isabelle Essonghe :
Je tiens d’abord à préciser que notre démarche est guidée par la volonté d’informer correctement, même si une entreprise dispose de la liberté d’agir tant qu’elle répond à ses engagements réglementaires et de performance.
Avec la suppression de l’aide de l’État en 2018, nous avons été contraints d’engager une réduction drastique de notre réseau de proximité afin d’assurer les équilibres économiques de l’entreprise.
Sept ans après, les signaux de survie de Ceca-Gadis n’ont jamais été aussi négatifs.
Tous les segments de dépenses des ménages ont subi l’impact de l’inflation, et malgré nos efforts, certains indicateurs restent extrêmement inquiétants.
Nous avons pourtant la volonté et la conviction d’inverser cette mauvaise courbe.
Pourquoi fermer les magasins de proximité des villages, alors que leur rôle social semblait important ?
Nos mauvais indicateurs sont aggravés par la symbolique même de ces fermetures. Les riverains comprennent difficilement notre présence dans certaines zones où les charges fixes augmentent fortement alors que la demande diminue.
Entre 2021 et 2024, les charges liées à l’exploitation ont augmenté de 48 %, puis de 42 %.
Le taux de dégradation a atteint 78 % par rapport à 2023.
Dans plusieurs zones rurales, nos efforts ne suffisaient plus à assurer la viabilité économique, d’autant que d’autres revendeurs ambulants occupent désormais ces marchés.
Continuer ainsi nous conduisait à une chute quasi immédiate de la Ceca-Gadis, avec des conséquences sociales graves :
– perte de plus de 2 000 emplois directs et indirects,
– disparition du réseau de proximité en 24 heures,
– impossibilité de maintenir une offre différenciée adaptée aux ménages.
Comment êtes-vous arrivée à cette décision difficile ?
Le taux de dégradation de nos performances a été au cœur des discussions du Conseil d’administration.
Depuis 1967, Ceca-Gadis joue un rôle de modérateur de prix en offrant des produits à bon rapport qualité/prix.
Il devenait urgent de repenser notre modèle de proximité et nos implantations.
Depuis la suppression de la subvention étatique en 2018, nous fonctionnons sans soutien financier, dans un contexte de baisse de fréquentation et de changement profond des comportements d’achat.
Nous avons donc dû opter pour une politique de réduction significative du réseau afin de préserver l’essentiel.
Vous confirmez donc que cette réduction est devenue incontournable ?
Oui.
Le modèle “Gaboprix” est devenu le moins performant depuis 2019.
La hausse des charges, les mutations économiques et l’évolution de la demande nous obligent à diminuer nos coûts.
Nous allons donc supprimer plusieurs dizaines de magasins à très court terme pour éviter une défaillance totale.
Les zones les plus touchées sont :
– l’Estuaire,
– la Nyanga,
– la Ngounié,
– l’Ogooué-Lolo,
– le Haut-Ogooué,
– le Woleu-Ntem,
– l’Ogooué-Ivindo.
C’est un crève-cœur, mais c’est indispensable pour maintenir l’activité globale.
Quelle sera l’ampleur de ces fermetures ?
Sur les 103 magasins initialement présents sur le territoire, nous avons réduit la présence à environ 60 points de vente.
Ces fermetures ciblent les zones devenues non rentables et celles où la fréquentation ne justifie plus l’exploitation.
78 % de nos dépenses sont absorbées par les charges fixes : un ratio insoutenable pour une entreprise privée qui ne bénéficie plus d’aucune aide de l’État depuis 2018.
Cette restructuration s’inscrit dans le plan “Excellence 2024-2027”, dont l’objectif est de stopper la dégradation financière et de reconstituer un réseau solide, moderne et mieux ciblé.
Estimez-vous que cette restructuration permettra d’ouvrir une nouvelle ère ?
Absolument.
Ce contexte difficile nous oblige à accélérer la transformation stratégique de l’entreprise.
Le plan “Excellence 2024-2027” repose sur deux priorités majeures :
1. La digitalisation de nos services
Pour moderniser l’expérience client, optimiser les flux et positionner Ceca-Gadis comme un acteur omnicanal d’ici 2027.
2. Le soutien accru aux producteurs locaux
Nous allons renforcer l’approvisionnement auprès des filières gabonaises, améliorer la visibilité des produits locaux et développer une communication davantage tournée vers le “Made in Gabon”.
Votre ambition est donc clairement le redressement et la modernisation de l’entreprise ?
C’est totalement notre ambition.
Nous allons engager toutes nos forces dans cette transformation.
Nous voulons construire une Ceca-Gadis :
– plus robuste,
– plus moderne,
– plus proche des besoins des consommateurs,
– et mieux connectée aux réalités des territoires.
Un chantier majeur est également lancé :
la rénovation et la modernisation de 27 supermarchés, dont trois déjà réalisés à Libreville.
Par ces choix difficiles mais responsables, nous préparons l’avenir et assurons la continuité de notre mission :
rester la chaîne de distribution de référence pour les familles gabonaises.
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